Quelle surprise ! En commençant à enquêter un peu sur le poulet le moins cher possible, dans les rayons volaille emballée en barquette de plusieurs enseignes de grande distribution à Tulle – et de la viande « française » hein, attention que ce soit bien notifié – je relève certaines marques a priori incontournables, Le Gaulois par exemple…
En lisant un de mes 418,6 journaux préférés, S!lence de juin 2024, page 21, j’apprends que l’association L2141 a organisé à Paris, place de la Bourse, le 24 avril dernier une action « poulets géants » pour cibler cette marque et dénoncer l’horreur. En effet, les derniers tripatouillages génétiques ont réussi à fabriquer des poulets qui atteignent leur taille adulte encore plus vite ; tellement gros et difformes qu’ils ne peuvent plus se déplacer ni respirer normalement. L214 dénonce fort à propos les conditions de vie de ces animaux et demande l’arrêt de l’utilisation de cette souche Ross 308.
Quelle que soit l’éthique personnelle, en termes de réduction de sa propre conso’ de viande et de recherche de qualité de son alimentation, avec les choix éventuels de végétarisme ou de véganisme, on ne peut malheureusement pas en rester là. Ça empire ; on observe que le modèle américain des giga-usines de porcs, de vaches ou de poulets, rassemblant des milliers, des dizaines de milliers d’animaux, s’impose peu à peu. Dans le monde et chez nous. Après la Bretagne, la Vendée et le Nord, premières régions touchées, c’est tout le pays qui voit s’installer des gros hangars. En Limousin comme ailleurs.
Comment accepter sans rien dire, sans rien faire que d’un bout à l’autre de la chaîne de production-consommation, il y ait souffrance, avec des conditions d’élevage des animaux scandaleuses, en trop grand nombre dans des pseudo-fermes ? Avec par conséquent un climat professionnel indigne pour des salariés obligés de supporter des conditions de travail sanitaires déplorables (atmosphère polluée, images malsaines, contacts répétitifs avec des poulets en mauvais état, manipulation et inhalation de produits désinfectants, etc.). À l’autre bout de la chaîne, une production de nourriture de basse qualité.
Eh bien en fait, c’est encore un peu plus grave que ça. La malbouffe, il y a 20 ans, a été dénoncée par José Bové (paysan moustachu « gaulois » c’est le cas de le dire, que les plus jeunes n’ont pas connu). Elle a explosé dans les grandes largeurs, dans le sens de l’acceptation sociétale, le temps, grâce à des millions d’euros dépensés en pub et marketing, grâce à la PAC (politique agricole commune) qui profite aux grosses coopératives, aux gros investissements (et endettements), aux grosses surfaces, grâce à l’aide de l’État et des collectivités qui versent des subventions et assurent (imposent souvent) les autorisations – la légalité de la mainmise industrielle.
Résultat : « Cocorico » ! Le groupe LDC, propriétaire de la marque Le Gaulois, est le leader français et européen de la volaille. Il annonçait fin mai 20242 des bénéfices records, en progression de 35,5 % en 2023-2024 « malgré » l’inflation ; en effet il a vendu plus cher ses produits alors que le prix des céréales – nourriture pour les animaux – baissait…
Ce modèle, qui élimine les paysans et paysannes indépendantes, les petites structures, le vrai plein-air, en ne tolérant que les exceptions de niche commerciale infimes, est en train d’advenir à grand pas pour tout le secteur de l’élevage ; les ovins et bovins en extensif sont dans le viseur dans les mois à venir… À suivre.
- L214 éthique et animaux fait référence à l’article L214-1 du Code rural, qui reconnaît pour la première L214-1 du Code rural, qui reconnaît pour la première fois en 1976 les animaux comme des êtres sensibles.
- Le Figaro du 29 mai 2024, une mine d’information et de grignotages-bonheur sans faim.
Par RICO