Le coup d’essai en décembre 2018 avait été modeste, mais vraiment pas ridicule pour une première. à l’appel de Virginie Marchal (voir encadré ci-contre) lancé sur les réseaux sociaux, deux-cent-cinquante personnes avaient marché dans les rues de Brive, dans une joyeuse cacophonie, pour alerter sur l’urgence climatique. Mais le 16 mars dernier, alors que sur le plan national et mondial on annonçait la marche du siècle pour le climat, ce sont plus de mille personnes qui se sont mobilisées à Brive, toujours sur l’initiative de Virginie !
Il y avait bien sûr les figures associatives locales, mais il y avait aussi en nombre des anonymes, des enfants, des parents de tous âges… Une petite vingtaine de gilets jaunes était aussi de la partie, même si – contrairement à la marche de décembre – aucune banderole ou pancarte ne faisait mention de la convergence des luttes sociales et climatiques. Interrogés sur leur présence, le discours reste flou : « Nous sommes les gilets jaunes de Cana. On est favorables aux revendications de la manif mais l’important c’est la justice sociale et fiscale. » Et lorsqu’il s’agit de préciser les revendications environnementales avec lesquelles ils sont le plus en résonance, le dialogue tourne court : « On nous parle du diesel et du CO2, mais avec le diesel y a pas de problème de CO2, ça c’est avec l’essence. Nous on veut du pouvoir d’achat, une hausse du minimum vieillesse. Et nous ça fait quatre mois qu’on est dehors pour ça ! » Inutile de relever le concours de braguette au milieu d’une foule dont une partie milite pour le climat depuis plusieurs décennies !
Du côté des enfants les choses sont plus simples. Sous le regard fier de leur papa, Gaspard et Justine nous expliquent : « On était beaucoup, c’était bien, on a fait du bruit pour se faire entendre ! Pour moi, un problème, c’est qu’il faut arrêter de manger certains légumes quand c’est pas la saison. Et il faut acheter chez les producteurs. […] Et on jette trop de choses, il faut faire moins de déchets ! […] C’est la première fois qu’on vient à une manifestation, on va recommencer s’il y a besoin ! » Ah, le pragmatisme des enfants …
À l’issue de la marche, Virginie avait réussi à se faire recevoir à la mairie de Brive – contrairement à la marche de décembre. Tous ceux qui le souhaitaient étaient invités à l’accompagner. Mais le maire ayant autre chose à faire ce jour-là, c’est Daniel Fischer, conseiller municipal de Malemort et conseiller délégué à l’agglo de Brive chargé de l’amélioration du changement des méthodes de collecte et du tri des déchets ménagers et assimilés qui s’y colle. M. Fischer indique qu’il va lancer le débat avec une présentation préparée par l’agglo, listant sur plus de trente diapos (!) les réalisations de l’agglo en matière de développement durable… Rapidement les participants s’impatientent et souhaitent intervenir.
Dominique Gaudefroy, militant associatif de longue date, témoigne « M. Fischer a démarré son exposé en faisant une référence qui a traduit tout de suite son état d’esprit puisqu’il a évoqué « ces fanfarons du Larzac des années soixante-dix » ! Les grands problèmes sous-jacents à cette marche ne sont pas une préoccupation pour les responsables élus puisqu’ils donnent leur aval pour détruire les parcelles les plus remarquables en espaces rares et menacés du Limousin. » étienne Roger, président de l’association Vues sur les Monédières et également présent à la rencontre, ajoute : « Aux questions environnementales, Daniel Fischer répond « Développement économique. » Mais quel développement ? Y a-t-il lieu d’être fier d’inaugurer un KFC à grande réclame ?
Ça crée des emplois ; mais quels emplois, précaires, abrutissants ? Bref, un vrai dialogue de sourds, une vraie occasion manquée car sans doute mal préparée, malgré le courage et la bonne volonté évidente, que l’on se doit de saluer, du seul élu présent qui a fait ce qu’il a pu. »
Mais la lutte pour le climat ne s’arrête pas le 16 mars. Parce qu’il y a urgence, que marcher ne suffit plus et qu’il faut aller beaucoup plus vite, cette fois-ci Virginie Marchal – et le groupe d’amis qui l’entoure – propose de courir !
Rendez-vous donc le 24 mai à Brive pour une course pour le climat : https://bit.ly/2IHlujp.
Mais qui est Virginie Marchal ?
Une figure politique locale ? Une militante écologique connue depuis toujours en Corrèze ? à sa manière, probablement, mais Virginie est en réalité juste une citoyenne comme tout un chacun. Architecte paysagiste de formation, elle est ensuite devenue professeur des écoles. « Mes élèves ont huit ou neuf ans. Quand ils seront adultes, en âge de prendre des décisions, il sera sans doute trop tard. Le changement climatique a déjà commencé. C’est maintenant qu’il faut agir. Si chacun repart dans son petit village après la marche pour le climat en se disant : je change mes habitudes de consommation, c’est positif. »
C’est ce qui pousse Virginie à agir et prendre des initiatives citoyennes, que ce soit dans sa classe avec des projets de sensibilisation contre le harcèlement ou pour la sauvegarde de l’environnement ou encore dans la vie civile avec cette marche pour le climat.
Par Michel Dupuis