L'image montre l'extérieur de l'Auberge de la Tanière, illuminée à la tombée de la nuit, symbolisant un lieu communautaire et culturel revitalisé par trois amis dynamiques dans la petite commune d'Orliac-de-Bar. Ce lieu, autrefois un restaurant et un hébergement menacé de fermeture, est devenu un espace de lien social, proposant des activités variées comme des projections et des tournois, tout en servant de cantine pour l'école locale.

Orliac-de-Bar, une dynamique qui prend

Nous l’avons déjà évoqué : « Les cafés associatifs poussent comme des champignons ! » (voir Trousse
no 49). On y revient sous une autre forme avec l’Auberge de la Tanière, car ces lieux aussi divers que variés
nous remplissent de joie et d’espoir. Ces petits bouts de terrain conquis face à la désertification des
campagnes, à l’isolement et au repli sur soi, sont des victoires de coopération. Leur équilibre est subtil,
délicat. Ces lieux requièrent à la fois beaucoup de force et de volonté mais demandent aussi de savoir
baisser les armes et accepter l’autre dans sa différence.

Ici ce sont trois amis, Elsa, Thomas et Vincent, qui réfléchissent ensemble à un lieu commun, un lieu de vie mais pas que… Ils pensent d’abord à une ferme, ça leur trotte dans la tête mais ça ne prend pas forme. C’est la rencontre avec l’Auberge de la Tanière qui va être déterminante et leur donner l’impulsion. Elsa vient du monde de la culture et du spectacle, Thomas est cuisinier, Vincent a déjà bossé dans des bars et fait du service. Le tout semble soudain former un possible.


L’auberge tourne, comme on dit, il y a un restaurant, de l’hébergement, mais les patrons veulent passer la main et ne trouvent pas de repreneur, le lieu pourrait fermer. Les trois amis s’y projettent immédiatement, ils n’y voient pas un restaurant mais plus que ça : du lien social, un lieu culturel, une base pour faire naître une dynamique.

Ils prennent rendez-vous à la mairie, la rencontre « se passe très, très bien », se sentant soutenus ils se lancent : « C’était très important pour nous d’être accueillis, de ne pas arriver en opposition ». La mairie est propriétaire des murs, Elsa, Thomas et Vincent achètent le fonds de commerce. Cela va assez vite. Les visites ont lieu en juin, et dès le 15 août ils ont les clés. C’est qu’il y a un enjeu de calendrier, l’Auberge est aussi la cantine de l’école. Le trio relève le défi et, après une dizaine de jours intenses de travaux, ouvre à temps le 1er septembre 2022.
L’école d’Orliac, au sein du regroupement scolaire intercommunal, accueille les midis une petite vingtaine d’enfants de Corrèze, Saint-Augustin et Chaumeil, dans une salle qui leur est réservée. Le fonctionnement est atypique mais représentatif des besoins spécifiques du territoire. C’est sûrement un des aspects pour lesquels l’équipe se reconnaît dans le lieu, ils ont envie de faire autrement et en un sens, c’est déjà le cas : « On est contents aussi d’animer pour les enfants. On organise des tournois de foot, des projections ».

Comment s’est passée l’intégration?

« La mairie soutient nos projets et initiatives. Avec les habitués ça dépend. On est arrivés vite, de notre milieu alternatif avec nos belles crêtes de punks. Au début, y a eu des curieux avec des a priori et des attentes, qu’on a entendus et dont on a tenu compte. On voit des gens très différents ici, on accueille tout le monde, les portes sont ouvertes. Ça amène de la discussion, on sent qu’on est respectés dans nos convictions. Notre authenticité est reconnue et appréciée.

C’était important pour nous d’être vigilants sur certains sujets, des choses qu’on n’avait pas envie de tolérer. Le sexisme, le racisme, ce n’est pas possible. On utilise les murs comme espace pédagogique, on met plein d’affiches. Certains ont continué de venir et d’autres non.

Les habitués nous ont surpris aussi, on a fait une soirée queer1 par exemple, beaucoup de gens du village sont venus, ils ont été tout à fait respectueux. On a fait une soirée de musique techno, jusqu’à 4 h du mat’, une famille est venue danser, ils étaient cinq générations différentes!

Les cafés philos aussi, on s’attendait à avoir un public alternatif mais non, il y a eu beaucoup de répondants dans le village, majoritairement des locaux. »

Une base toujours en cours de structuration

« La première année on a bossé 60 heures par semaine chacun. On faisait tout… La cuisine, la compta… On avait envie de privilégier le local et le bio mais du coup on allait chercher des produits partout.

Maintenant on a décidé d’arrêter la restauration,on veut sortir du schéma classique. On fait traiteur pour des événements ou bien les jours de cantine on peut proposer des plats,mais sur commande. Le côté menu sur une table ne nous plaît pas, c’est un lieu d’initiative,différent.

On s’est aperçu que la restauration telle qu’on la connaît est en opposition avec le projet. En proposant des produits locaux et bio à des prix raisonnables, on ne dégage pas de marges.

Le fait d’arrêter la restauration classique nous a permis de nous dégager du temps et de prendre du recul. On a structuré certaines choses, créé des liens, on fait lieu de dépôt pour La Dépaysante par exemple, on a plus de relais, donc moins besoin d’aller chercher les produits nous-mêmes.

La forme juridique, on regrette un peu, on a voulu faire vite, on est en SARL. On aurait été bien en association, dans le fonctionnement,ça s’en rapproche. » L’idée de se dégager du temps c’est aussi de pouvoir travailler ailleurs,pour ne pas dépendre financièrement de La Tanière « Le budget s’équilibre, mais on ne se paie pas. »

La dynamique s’étend

« C’est une période charnière, on se réoriente. On est très contents de la direction que ça prend. On sort la tête du guidon. »

Une des ambitions de l’équipe était de créer une épicerie. Et c’est chose faite. En face de l’Auberge s’est ouverte une épicerie participative en octobre 2023. L’idée est venue de l’Auberge mais c’est finalement la mairie qui a porté le projet, avec l’accompagnement de monépi. Une quarantaine de bénévoles tiennent le lieu de façon autogérée.

Depuis quelques semaines l’équipe travaille aussi à un jardin partagé, derrière l’épicerie. Leur volonté est de faire participer les enfants de l’école pour qu’ils puissent faire pousser la nourriture qu’ils retrouvent dans leurs assiettes. C’est là aussi que sera placé par la municipalité le compost collectif.

Enfin, une fois par mois, La Tanière propose un mini marché avec de l’artisanat, des producteurs, de la cuisine. Bientôt il y aura une friperie mobile et plus tard des jams-sessions.

« Ce qui nous intéresse, c’est de faire vivre quelque chose concrètement, politiquement, localement. Ce n’est pas qu’à nous, nous sommes ouverts à toutes sortes de collaborations. La Tanière est un projet alternatif d’initiatives sociales et locales. L’envie est de faciliter et d’accueillir toutes sortes de possibles. »

Un lieu qui se pense, complexe et attachant. Un endroit chaleureux à découvrir, des soirées conviviales et une équipe sympathique vous y attend.

  1. Queer : (Anglicisme) Dont la sexualité, l’orientation sexuelle ou l’identité de genre se situe hors des normes sociales.

Par CAROTTE et JUNO

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