Aaah, la laïcité. On en entend tellement parler, de ce concept si cher aux cœurs des français ! Nous vivons dans une République laïque, c’est la Constitution qui le dit. Pas de voile, pas de kippa, et même, pas de jupe trop longue dans l’espace public, vous savez déjà tout ça. Mais est-ce que c’est ça, la laïcité ? Retour aux sources.
La laïcité, c’est le principe de séparation de l’État et de la religion et donc l’impartialité ou la neutralité de l’État à l’égard des confessions religieuses.
En France, la laïcité est née de la révolution (fin des privilèges ecclésiastiques et affirmation de principes universels, dont la liberté de conscience et l’égalité des droits), et par là même de la modification de la source du droit : on passe du droit divin (la justification d’un pouvoir non démocratique par le choix de Dieu) au droit naturel (la souveraineté des peuples).
Jusqu’au début du 20e siècle, l’idée de laïcité représente avant tout la volonté de réduire l’influence de l’Église catholique sur les institutions, influence identifiée comme une menace majeure pour les valeurs républicaines.
Au 19e siècle, l’État s’affranchit de ses liens historiques avec l’Église catholique et crée de nouvelles normes politiques et sociales bâties sur le principe de l’universalisme républicain : pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, organisation de l’État, l’éducation, les rites de la vie civile, l’évolution du droit et de la morale, etc., indépendamment de tout dogme religieux. Ce processus se conclut par la (fameuse) loi sur la séparation des Églises et de l’État de 1905, qui marque l’aboutissement d’une laïcisation affirmée.
Il ne faut donc pas confondre laïcité et laïcisation. La laïcité ne consiste pas à combattre les religions, mais à empêcher leur influence dans l’exercice du pouvoir politique et administratif, et à renvoyer parallèlement les idées spirituelles et philosophiques au domaine exclusif de la conscience individuelle et à la liberté d’opinion.
Si jusqu’en 1989 le débat autour de la laïcité oppose les militants laïcs à l’Église catholique, c’est l’Islam qui devient alors l’objet de toutes les interrogations, voire de toutes les suspicions, à grand renfort médiatique. Tout se cristallise autour des affaires dites « du voile », d’abord en 1989 à Creil, la création du Haut Conseil à l’intégration, de nouvelles « affaires » en 2004, le rapport de la commission Stasi, pour aboutir à la loi du 15 mars 2004 sur les signes religieux dans les écoles publiques. Le débat s’élargit ensuite aux parents accompagnateurs de sorties scolaires, puis au port de la Niqab, jusqu’à aboutir à la loi du 13 juillet 2010 interdisant la dissimulation du visage. Et ce n’est pas fini… Rassurons-nous, un Conseil général, lieu du pouvoir politique local, peut, lui, installer une crèche catholique à Noël. Rien à voir alors avec la religion, c’est affaire de tradition.
Mais en quoi le port d’un voile par un élève, un parent, ou même une puéricultrice de crèche permet l’influence de l’Islam sur le pouvoir politique ou administratif ? Mystère… La division de la gauche sur le sujet, au nom du combat féministe, aura permis la réapparition de la politique coloniale qui avait cours en Algérie, autour des « cérémonies de dévoilement ». Le slogan était : « N’êtes-vous donc pas jolies ? Dévoilez-vous ! ».
Pour aller plus loin :
– Voir le documentaire « Un racisme à peine voilé »
– Lire Jean Baubérot « Histoire de la laïcité en France – PUF
– Écouter : http://bit.ly/1JCL2n4