COURS DE « RÉVOLUTION » au lycée Edmond Perrier
En fin de matinée, le vendredi 30 novembre 2018, au rond-point qui relie l’avenue de La Bastille au quai Baluze, à Tulle, à quelques mètres des locaux de La Trousse. Alors que je tente de ré-oxygéner mon cerveau embrumé par des heures d’informatique, une centaine de lycéens, flanquées de gilets jaunes fournis par… la CGT – c’est comme le port Salut, c’est écrit dessus, dans le dos (j’ai enfin compris cette blague en écrivant cette chronique, voir ici : https://bit.ly/2C5B04V… Mais je m’égare) – se dandine d’une basket sur l’autre, ralentissant quelque peu la faible circulation du jour.
Intrigué par l’ardeur acnéique de nos chères têtes blondes, j’observe la cohue générée. Amusé voire ému de constater que chaque génération vibrionne encore au son des roulements de trompettes révolutionnaires du moment.
Rayonnant et rasséréné par ce petit mouvement pendulaire et quasi perpétuel de notre jeune humanité occidentale, je m’apprête à retourner perdre mes synapses dans l’affolement programmatique de la sombre boîte à bits. Quand, soudain, je me souviens que travailler pour un journal c’est aussi… écrire dedans. Je reste donc un peu plus longtemps en éveil devant ce petit théâtre d’un quotidien forcément jaune. Et jaune, mon sourire béat le devient devant la scène qui se joue à l’instant : je vois les lycéens s’écarter à la demande des costumés bleu-nuit qui les encadrent, afin de laisser passer les automobiles, immobiles jusque-là. Le scénario se répétant à l’envi, une question me brûle – et pas seulement les lèvres. Je m’approche donc de la communauté prépubère et demande au jeune flambeur qui leur sert de guide motorisé : « mais qui fait la circulation, vous ou la police ? », mais oui me dis-je, qu’est-ce que c’est que cette révolution ?
S’ensuit une explication désordonnée mais sincère. Faite à la fois de contrition et de peur de l’autorité. J’apprends que le proviseur et la CPE encadrent également le petit groupe et leur demandent – gentiment certes mais avec Charles Ingallisme – de laisser passer régulièrement les papas et les mamans motorisés, parce que faut pas déconner quand même !
Quand vient midi, la joyeuse troupe est invitée à rejoindre la cantine de lycée. La révolution le ventre vide c’est dangereux, ça rend faible !
Je discute avec l’une des adultes fermant le convoi de béjaunes. CGTiste, elle s’étonne de mon étonnement et m’explique qu’ils sont là pour éviter de mettre les lycéens en danger. Des mineurs se serait glissés parmi eux… Un mineur c’est comme la porcelaine de Limoges, c’est sacré et ça casse facilement.
Un proviseur accompagné par sa CPE. Un encadrement syndicaliste. Des jeunes qui retournent rapidement dans leurs pénates pour ne pas louper la tarte aux myrtilles. En somme, une petite sortie scolaire bien sympathique.
La révolution, elle, elle attendra la génération spontanée.