Le Tatou, un abri héliporté construit par des étudiants pour les bergers de la Vanoise
Tout enseignement devrait se développer au service d’une vie communautaire. Nous allons inventer, dans nos écoles de la vie, des pédagogies innovantes, apprendre les uns des autres, faire preuve d’urbanité, de tolérance, permettre ainsi aux différences culturelles de s’estomper.
Voici un exemple avec la commande passée par le Parc national de la Vanoise à l’école d’architecture de Lyon pour la livraison d’un abri de berger.
Le programme du Parc National de la Vanoise était de concevoir un abri de berger de nouvelle génération, posé au plus près des troupeaux, à 2 600 mètres d’altitude. Quelle chance d’avoir ainsi un maître d’ouvrage ambitieux et téméraire ! La mission a ensuite été confiée au master « Architecture vertueuse » qui en a fait un thème exploratoire. Le budget a été d’environ 35 000 € par abri monté et de 5 000 € de transport par hélicoptère1.
Contrairement au tatou qui vit en ermite, Estelle Morlé et Emmanuel Ritz se sont joints à moi dans le master. En effet les architectes ne peuvent plus concevoir en solitaires comme des ours !
Rappelons que le tatou est un étrange mammifère, protégé par une carapace de boucliers articulés. C’est un « animal-totem » qui fixe les frontières de notre équilibre et définit nos espaces de liberté.
Dont acte… nous voulions transmettre aux étudiants une vision collective et vertueuse, sociétale et environnementale en passant à l’acte grâce à de nouvelles pratiques : « Sublimer un partage des compétences et une réelle transmission des savoir-faire ! »
Le processus de conception a permis aux huit étudiants, J. Beyaert, R. Bonelli, R. Burteaux, J. Fourest, G. Garofalo, C. Kouraichi, S. Morello et M. Ottaviani, d’être forces de huit propositions. Nous avons ensuite retenu trois projets. Trois maquettes à l’échelle 1/2 ont été fabriquées par ces étudiants aux GAIA (Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau) : « la tente, la sphère et le prisme ». Les étudiants sont revenus de vacances avec une synthèse des retours critiques : le projet final du tatou était né.
De nombreuses contraintes sont apparues : le transport de modules de moins de 750 kg en six rotations d’hélicoptère, la nécessité d’un montage rapide sans fondations et l’objectif d’un confort optimal pour un ou deux bergers avec cinq jours d’autonomie sous un abri de 12 m2. Cette démarche collaborative engagea une chaîne d’acteurs (ingénieurs, entreprises, mécènes équipementiers), des personnes ressources qui ont nourri pas à pas le projet étudiant. Les détails ont donc été conçus et mis en œuvre par des étudiants, des enseignants et des entreprises partenaires.
L’abri pastoral comprend cinq usages en passant du sale – le sas d’entrée – jusqu’au propre – le lit – puis aux stockages : « Entrer et ranger ; se laver ; cuisiner et manger ; dormir ; stocker l’eau et la nourriture du chien ».
Les modules ont été déposés sur deux rails puis emboîtés2. Le berger et le propriétaire du troupeau étaient ravis après la saison. Trois autres abris ont été commandés par le Parc de la Vanoise avec une mission spécifique confiée à Emmanuel Ritz. Un brevet a été déposé pour l’école d’architecture par Insavalor. Il est donc possible de construire de nouveaux abris en contactant : tatou.cabane-berger@lyon.archi.fr.
Par PAUL VINCENT, ex-architecte, enseignant ENSAL, chercheur LAURE
Le QR Code et le lien permettent d’ouvrir les trois documents suivants : bit.ly/46fHjiq
- Tatou Communiqué de presse Vanoise ENSAL 2018
- ENSAL Tatou Film montage PV.mov Pour aller plus loin : ENSAL Inventaire projets AV.pdf