Historique

Rapport moral (historique)

 

Je ne sais pas quelle sera la dimension de moralité de ce rapport. Il est surtout le prétexte à retrouver un peu de notre histoire, si courte soit-elle. Mais l’histoire n’est-elle pas pétrie de morale ?…
Face à l’engouement bestial qu’a suscité l’exercice, c’est moi, Philippe, qui m’y colle. Je me console en me disant que le caresseur de clavier a, comme auparavant le porteur de stylo, le pouvoir, en même temps grisant et intimidant, de créer la légende du bout des ses doigts avec des bouts de mémoire. Me concernant, il y a heureusement les archives : au fond d’une armoire, j’ai retrouvé l’agenda 2013. Obsédés par le temps qui passe et les numéros qui s’enchaînent, nous voulions retrouver ce qui fit date…
Je l’ai retrouvé : semaine 38 de l’année 2013, et plus précisément mardi 17 septembre à 19h. à cet endroit précis reste griffonné au crayon à papier : « réunion truc journal chez Jean-Marc ».

Le « truc journal », ça faisait un moment qu’on s’en parlait… Puis un jour on a posé une date. Nous voilà : Cyril Perrin, Pascal Brette, Jean-Marc Vareille et moi, Philippe Van Assche, autour de la table. Tous les quatres on diverge – et à quatre c’est pas mal, mais c’est grace à Jean-Marc – mais on converge aussi pour du papier, du local et de l’accessible au plus grand nombre. Reste l’ampleur de la tache. Qui a déjà fait un journal ? Bah… personne en fait… Enfin l’intention est là.

Il y a eu ensuite la rencontre de Pascal et moi avec Josselin, du Lot en action, journal de proximité et associatif qui sévit dans le Lot depuis 5 ans. Il nous parle de leur volonté d’essaimer tous azimuts. Il nous parle aussi de l’opportunité de s’essayer en réalisant un dossier central sur Le battement d’ailes. Nous signons. Josselin écrira l’introduction, nous ferons des articles de fonds sur la coopération, l’autogestion et l’agroécologie. Nous trouvons des équipes pour parler du fonctionnement et faire des témoignages. Nous sommes fébriles. C’est une première. Le lot accepte nos proses. Nous faisons la Une du numéro 78 du 24 janvier 2014. Ça nous donne de l’allant.

Enthousiasmés par ce galop d’essai, nous revenons vers les deux autres compères avec la proposition de se faire cocooner par nos voisin du Lot et démarrer concrètement l’aventure. Il y a des réticences : quelle sera notre marge de liberté ? Nous avons peur du clonage. Date est prise, pour autant, pour une rencontre historique à Gramat, siège du Lot en Action. Nous y sommes tous les quatre le mercredi 5 février 2014. Rencontre au « sommet »
avec Laurent dit Bluboux, l’initiateur et leader du Lot en Action et son fidèle acolyte, Matou, maquettiste. La rencontre est riche en enseignements. Nos « grands frères » nous mettent en garde sur le compliqué de la chose. Nous en avons tiré les enseignements et c’est sans contexte grâce à eux que nous en sommes là à l’heure où j’écris ce rapport. « Le plus facile finalement c’est d’écrire des articles », ma mémoire à particulièrement retenue cette phrase dans l’angoisse des productions à venir et de la page blanche éternellement recommencée. Ce ne serait donc pas la partie la plus difficile ! Ah !…Bon… Évidement, il n’avait pas tort le Bluboux. Il n’avait pas tort.

Au sortir de cette réunion trois objectifs : s’entraîner à écrire dans Le lot en action, recruter et s’organiser. Nous constituons un comité de rédaction qui se réuni pour la première fois le 11 mars 2014. Nous y définissons un plan de bataille.

Extrait du compte-rendu du 12 mars 2014

1ère étape :
– participation à l’existant et organisation locale : rédiger des articles à insérer dans le Lot en Action tel qu’il existe,
– organiser notre groupe : trouver des rédacteurs, des correcteurs, un secrétaire de rédaction, un maquettiste, un graphiste… et trouver la méthode, le bon rythme…
– mettre en place le réseau de diffusion au moins dans le sud de la Corrèze et identifier les possibles au delà.
– Venir s’informer et se former à Gramat

2ème étape :
– créer une déclinaison corrézienne des 7 pages locales dites « info-lot » et des deux pages d’agenda. Nous nous sommes mis comme horizon le mois de septembre, mais nous convenons tous que c’est un peu ambitieux et que les choses irons au rythme du possible.

3ème étape :
l’ultime : – s’approprier les feuillets périphériques (16 pages). Il s’agit des pages « info-locale », « des plantes et des hommes », « chronique », la couve et der de couve et garder en commun – peut-être avec d’autres départements limitrophes – le tronc des 8 feuillets centraux (16 autres pages) :
le dossier, les pages « national », « régional », « résistance » et « vie du LEA ».
Il n’y a pas d’échéance fixée sauf celle d’être prêts pour cela. Ce qui signifie une équipe qui tourne avec tous les composants indispensables à la réalisation autonome de ces fameuses 16 pages.

Dans ce même compte-rendu, un premier schéma illustre notre fonctionnement et, surtout, nous faisons le choix dans la date du 22 mars pour une présentation du projet auprès de personnes que nous avons identifiées comme étant potentiellement intéressées par ce genre d’activité de scribouillard plumitif grégaire. Parce que, finalement, tout comité de rédaction qu’il y a, nous ne sommes toujours que quatre… Je n’ai pas retrouvé de trace écrite de cette première rencontre élargie.

Commence alors la phase de contribution au Lot en Action. Elle est frustrante pour nous. Avec un titre comme celui-ci nous n’arrivons pas à développer la vente du journal en Corrèze et valoriser les écrits que nous produisons sur des thématiques locales. Il est nécessaire de rapidement éditer notre propre parution et de dessiner le chemin qui nous y conduira. Dans un mail envoyé le 18 juin 2014 les choses se précisent. Le comité de rédaction n’a toujours pas réussi à réellement s’élargir mais la liste des noms pressentis est rééditée. Arnaud Jacquart, de l’association Rouletaplume est sollicité pour nous aider à construire notre propre identité.

Extrait du mai au comité de rédaction du 18 juin 2014
(le fameux appel du…)

Perspectives
Vous trouvez ci-joint le résultat de nos dernières réunions d’organisation, deux au total avec Pascal, Cyril et Philippe, puis avec Arnaud Jacquart pour l’une d’entre elles.
parution corrézienne bimestrielle à partir du mois de février (fin janvier) 2015. Les étapes pour y arriver sont décrites dans le document joint. D’ici là, nous proposerons tous les mois à partir de fin juin un supplément Corrèze (deux feuillets A3) pour promouvoir l’initiative (Cyril envoie la proposition dès que disponible). Il reprend les articles déjà écrits et des nouveaux à produire. La parution corrézienne sera composée de 4 feuillets (16 pages) periphériques, les centraux étant communs avec le Lot en Action. Ce qui implique une première page propre et donc un titre. La contribution mensuel au Lot en Action pourra continuer.

Eté 2014 : on trouve 600 euros en prêt et le compte à rebours est lancé avec la parution du supplément La Corrèze en action N°-4. Une parution de 8 pages dans laquelle s’insère, tel quel et dans l’autre sens, le journal du Lot en Action. Nous en éditons 150 exemplaires. Les articles qui y sont présentés sont globalement du recyclage de ce que nous avons écrit en début d’année. L’édito est, lui, d’actualité et donne le La de la petite musique en train de s’écrire et qui tous les jours devient plus collective. Dans ce numéro nous rejoignent Céline Chastanet, Céline Perrin, Violaine Brossard et Julie Devès.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le -3 en octobre 2014, le -2 en novembre, le -1 en décembre…. On s’entraîne, on propose. Cyril suit une formation sur le tas et les chapeaux de roue avec Matou, l’officier maquettiste du Lot… Et puis c’est le top départ, Le 0…. Nous n’arriverons pas à tenir l’échéance de février… Elle se décalera d’un mois. L’enjeu était trop important pour céder à l’urgence. Il fallait écrire mais aussi façonner et donner un nom. Autrement dit, mettre au monde. Arnaud dans le cadre de Rouletaplume est sollicité pour nous y aider. Nous sommes dix personnes à suivre les deux jours de formation à l’écriture journalistique les 31 janvier et 1er février. Je retrouve, là encore griffonné dans un coin d’agenda « dead line texte CEA ». CEA sera en fait baptisé LTC, La Trousse corrézienne. Puis plus loin est griffonné le 22 février « La trousse corrézienne, bouclage à Rouletaplume ». Des termes qui scanderont dorénavant la partition de notre temps.

Flash back dans le synopsis. C’est pour l’allaitement du lecteur accroché à la mamelle de l’histoire… : le 7 janvier 2015 au soir, nous nous retrouvons spontanément à Tulle place de la Cathédrale à quelques uns de ce futur journal en préparation de préparation, quelques uns parmi tant d’autres… Nous sommes interdits, ahuris, abasourdis par la nouvelle de l’attentat de Charlie. Arnaud me glisse à l’oreille avec son petit rictus d’ironie habituel : « sortir ce journal ça va devenir un devoir moral ». bien voilà, je savais bien qu’il y avait une once de moral dans cette histoire ! C’est là !…

« C’est avec une certaine émotion que je fais glisser mon stylo sur cette feuille. Si j’en suis là, si vous me lisez en cet instant, c’est que nous avons réussi. Réussi à écrire ensemble ce journal tant désiré ». C’est ainsi que commence l’édito manuscrit du N°0. C’est ainsi que commence aussi le baptême du feu. Nous y découvrons la difficile posture de journaliste, la posture médiatique, et d’une écriture critique. Nous ne sommes pas encore nés que les premières menaces fusent. Fragiles comme les cellules molles d’un embryon mis hors liquide amniotique, nous modifierons notre article phare de la page 3 qui fait la Une, pour le rendre plus acceptable. Compromis que nous nous promettons de ne plus faire. Nous expérimentons aussi l’art du débat, l’art de la critique et nous y sommes, ici aussi, bien novices et bien patauds. Les écorchés se frottent. Mais nous y survivons vaillamment. Le N° 0 c’est 18 contributeurs, des correcteurs, des diffuseurs, une véritable organisation qui se met en place chemin faisant.

Pour cette première, nous n’avions rédigé que 16 pages : les 4 feuillets périphériques. Et cela nous avait semblé déjà tellement miraculeux et ardus ! Pour autant, pour le numéro suivant, portés par l’élan et particulièrement insatisfaits du dossier proposé – cette fois – par le Lot en Action que nous avions repris tel quel, nous nous attaquons au dossier central. Le N° 1 sera notre premier dossier. Le pli est pris et nous continuerons sur cette lancée par la suite. Du côté organisation, nous décidons de nous structurer un peu. Nous optons pour un statut associatif, adapté à notre démarche. L’association La trousse corrézienne est donc créée officiellement le 26 mars 2015, suite à une réunion d’organisation avec ceux qui nous ont rejoints. Il s’agit alors de définir les différents espaces, identifier comment et où se prennent les décisions et faire le shéma de comment se fabrique notre journal.

Ce fameux shéma sera produit dans La trousse N°2 de juillet-août, page 29. Preuve que nous étions alors au point. Ce numéro d’été sera aussi celui et du dossier le plus mièvre que nous n’ayons jamais produit et celui de l’article le plus polémique : en guise d’article, il s’agissait en fait d’un dessin d’enfant de 11 ans en der de couv.

C’est courant du dernier trimestre 2015 que s’est créé la Komchefdir, collectif dirigeant entre Komandantur, Chefferie et direction. Elle aura pour rôle de traiter la partie gestion et donc de prendre les décisions qui s’imposent en ce domaine. En septembre, nous décidons d’embaucher Cyril pour qu’il puisse continuer son implication corps et âme sans avoir à chercher ailleurs de quoi alimenter le compte en banque familiale ; autrement dit à d’autres époques : faire bouillir la marmite.

En cette fin d’année nous avons enfin trouvé notre vitesse de croisière ; enfin, c’est mieux que ça n’a été. Nous avons tranché la question : nous restons bimestriel. Le comité de rédaction se stabilise autour de Cyril Perrin, Philippe Van Assche, Laurent Favre, Julie Devès, Marie Loche et Catherine Fischer. Groupe auquel se joint Pascal pour constituer la Komchefdir. Nous avons une trentaine de contributeurs dans le dernier numéro de l’année. Un binôme de secrétariat de rédaction, des diffuseurs qui, presque, inondent la Corrèze, et surtout des lecteurs, toujours plus de lecteurs. Pascal et Laurent sont en charge de la promotion. Catherine Fisher est en charge de coordonner la diffusion. Julie est responsable légale…

Et bon an mal an, la trousse trace sa route tout en rigolant de sa précaire stabilité. L’édito de novembre – décembre par Sousou en témoigne :