CoqueliCorrèze
L‘époque est riche et intéressante et le mouvement des coquelicots a participé à son niveau à l’animation médiatique nationale depuis deux ans, dans le domaine de l’agriculture, de la santé et de l’action citoyenne/démocratique. Le résultat est mitigé, c’est le moins qu’on puisse dire.
-Des milliers de citoyens se sont mobilisés sur des centaines de rassemblements chaque mois pendant près de 24 mois en France,
-Plus d’un million cent mille signatures ont été récoltées pour l’interdiction de tous les pesticides de synthèse, elles ont été remises à qui de droit au Ministère de l’écologie et/ou de l’agriculture peu importe.
Pour quels résultats ?
Le gouvernement continue à s’en chigner l’œil droit pendant qu’il se frotte l’œil gauche tellement cela le fait rire aux larmes. Nous observons concrètement que :
-La communication bat son plein, avec continuellement de la propagande et des mensonges en rafales.
-Des menaces de poursuites judiciaires nous sont envoyées, en cas de critiques trop appuyées envers l’agriculture conventionnelle, avec la cellule Demeter de la gendarmerie (insulte en passant pour nos amis de la Bio utilisant en référence la déesse grecque : le mouvement de Biodynamie existe depuis 1924).
-Des ouvertures appuyées sont faites aux pollueurs fabricants de l’agro-chimie, la consommation de pesticides continue d’augmenter dans notre pays parallèlement à la diminution du nombre d’agriculteurs, d’agricultrices et d’exploitations, cela va de pair. Par exemple : les néonicotinoïdes sont en passe d’être ré-autorisés pour toutes les cultures après le magnifique but marqué par les industriels de la betterave,
-Mépris total pour les propositions sorties des travaux de la Convention nationale Citoyenne pour le Climat, qui vont être repoussées, découpées en tranches fines et permettre de pondre quelques mesurettes du genre « interdiction des touillettes en plastique »
-Mépris total envers les maires des villes de toutes tailles confondues ayant pris des arrêtés anti-pesticides et foutage de gueule avec les chartes de pacification locales/régionales créées/récupérées de toute pièce pour atteindre deux objectifs : d’abord museler les riverains et ensuite faire perdre du temps aux associations et aux militants impliqués dans les instances d’élaboration ‒ qui n’ont comme d’habitude servi à rien sinon à bien montrer qui décide ‒ et à faire empirer les situations (les distances-limites d’épandage aux bords des champs n’ont pas augmenté, voire ont diminué ou peuvent l’être à la libre discrétion des industriagriculteurs-pollueurs) .
Que propose Monsieur Nicolino, le journaliste co-fondateur du Mouvement des Coquelicots?
En expliquant qu’ils sont à bout de souffle, là-haut, à Paris, au bout de deux ans, au sein du petit noyau de leur association. Ils nous propose de créer des comités « Nous voulons des paysans »…
Et là, nous craquons. Parce que je ne suis pas le seul à dire « ouf ! ». Monsieur Nicolino, vos bouquins sont très intéressants, vos analyses sont bonnes, vos méthodes nous fatiguent. Vous êtes en train d’oublier les milliers de petites mains qui se tuent à la tâche depuis 5, 10 , 20, 30, 40, 50, 60, 70 ans. Si si si, les pionniers de la bio, on vient d’en parler : les tout premiers écolos, les lanceurs d’alerte, nés avant vous, les naturalistes, les randonneurs, les paysannes, amoureux de leurs terres, aux méthodes douces et naturelles, etc. Les vieux, les vieilles, les jeunes, les récentes, les futurs paysans… luttant pour une agriculture à taille humaine, diversifiée, autonome, riche écologiquement, préservant la biodiversité et le vivant, sachant reconnaître leurs ennemis et leurs pièges…
Je sais, vous savez.
Vous êtes en train de vouloir créer à nouveau, réflexe tout à fait compréhensible, un énième collectif alors que le but du jeu serait plutôt de se couler dans une ou plusieurs organisations existantes, tranquillement, durablement, modestement et de participer à hauteur d’humain-citoyen à l’élan-fédérateur, complémentaire et démocratique de leurs actions et projets respectifs. Bordel.
Vous êtes en train d’oublier que des centaines d’associations et d’organisations, de collectifs… et même que des élus, de base en général, œuvrent déjà à combattre les pesticides et leur monde, à les éliminer sur le terrain, dans les sols des campagnes, des rues et dans les assiettes, dans les cantines, dans les magasins…
Je n’ai pas besoin de vous dresser une liste des plus connues, elles s’étaient alignées dans les soutiens de la campagne des Coquelicots. Je viens d’en compter quatre-vingt-quatorze.
Pour avancer, là, en Corrèze, avant de faire un énième collectif, faisons un petit bilan Tulliste en cinq lignes : je me suis promis de tenir les deux ans, je l’ai fait (sauf les deux mois de l’été dernier, trop peu d’énergie, j’ai abandonné). Au départ, nous avons essayé d’impulser une petite réunion avant l’heure du rassemblement, nous avons changé de lieu plusieurs fois, nous avons organisé des tables de signatures sur les marchés… Nous avons réussi, une demie-douzaine d’entre nous, à impulser une dynamique en direction des communes lors des dernières élections municipales.
Et maintenant ?
Je suggère à tous-tes ceux et celles qui ont signé la pétition de septembre 2018 à l’été 2020, et à tous les lecteurs et lectrices de La Trousse,
-De rejoindre, de participer, d’apporter de l’énergie et des idées aux différentes associations et groupes qui existent chez nous et qui militent directement ou de manière détournée pour l’abandon des pesticides, que ce soit la LPO (groupe Limousin de la Ligue pour la Protection des Oiseaux, très axée sur la biodiversité), la fédération Corrèze-Environnement et ses différentes composantes, le CIVAM (Centre d’Initiatives pour Valoriser l’Agriculture et le Milieu rural, fédération de six groupes limousins dont plusieurs sont concernés par les pesticides), Terre de Liens (pour aider à sauvegarder les terres agricoles et installer des paysans), la FRAB (Fédération Régionale de l’Agriculture Biologique), les Paniers Paysans et autres AMAP (Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) qui regroupent des consommateurs préoccupés par leur santé et la qualité des aliments, les CPIE (centres Permanents d’Information à l’Environnement), le Battement d’ailes (centre agro-écologique)… j’en oublie… et sur les marchés…
-De continuer à stimuler nos élus locaux car plusieurs villes, plusieurs communes corréziennes s’apprêtent à installer des maraîchers communaux pour approvisionner les cantines en bio…
Ça bouge dans le bon sens, et nous pouvons et nous devons participer, soutenir, et le faire, Collectivement,
Avec ténacité,
Avec courage,
Avec énergie.
En vraies fourmis.
Christophe Rastoll