CAFÉ LE TILLEUL à Saint-martin-la-méanne

Le café associatif de Saint-Martin-la-Méanne, joli coin perdu vers la Dordogne entre Marcillac-la-Croisille et Argentat. Frédérique me voit préparer le stylo et mes feuilles de papier : « Moi aussi c’est crayon papier, dit-elle, pour la compta, les commandes, les compte-rendus… »

Voilà comment débute ma petite interview-prise de contact avec le café associatif à Saint-Martin-la-Méanne, centre bourg, en bordure d’une petite place-carrefour pas loin de l’église, pas du tout dérangée par la circulation automobile. Un dimanche fin septembre, en fin d’après-midi, avec une bonne bière.
Angèle est là également, nouvelle habitante, participante plutôt que bénévole (important je vais y revenir) et locataire récente dans ce bâtiment du Café du tilleul… « bonjour tout le monde ! » Ah, un troisième larron arrive, Pierre, natif de la commune, il habite dans la maison qui l’a vu naître ! Est présent également, dans un coin de la salle d’un ancien bar décoré actuellement par une expo sur l’école d’autrefois à Saint-Martin : Rémy, client presque régulier et son petit Nathan qui boit un sirop.

« Le café associatif a ouvert en juin 2017, on a fêté ça en AG en mai dernier, après à peine un an d’expérience : et bien, bilan positif », dit Frédérique.
« Au départ, dans ce local, c’était une épicerie, puis une boucherie, et ensuite un bar… puis c’est resté fermé plus de quinze ans. Nous avons construit le projet il y a cinq ans, pour un café de village mais beaucoup de gens ont jeté l’éponge, pour des raisons de différence de vue ; nous sommes restés à trois, Pierre, Nadine et moi, et on s’est lancé : j’ai acheté la maison… Et donc nous avons créé un café associatif, très clairs sur nos objectifs : il ouvre tous les jours de 9h à 13h et de 18h à 20h. C’est un café pour tous, avec dépôt de pain quotidien, sur commande (la boulangerie est à Servières-le-Château). C’est le seul « commerce » du village, la dernière épicerie a fermé quand le café a ouvert. Il n’y a aucun impératif commercial, nous sommes « bénévoles » dans le sens où nous avons tous des revenus extérieurs de salariés ou de retraités. Personne n’est employé.
Pendant quelques mois nous sommes restés trois… et en septembre 2017, les gens ont dit « on va vous aider ». C’était bien parti. Nous sommes maintenant une douzaine d’actifs, des gens du coin, ou d’un peu plus loin, des anglais aussi… nous avons le soutien du maire. Pour les cérémonies officielles, la mairie joue le jeu, nous commande des produits. Nous avons la licence III (gratuite, avec l’autorisation municipale, nous proposons vin, bière, Salers : alcools en dessous de 18°). »
« Les gens du village viennent surtout chercher leur pain, nous avons ouvert ce lieu pour eux ; certains ne comprennent pas encore très bien que ce n’est pas un commerce ordinaire (« ça marche les affaires ? »), il faudra du temps et de la patience… Nous voulons égayer modestement la vie des habitants, les personnes âgées peuvent venir discuter, dit Rémy, et trouver un lieu convivial, autre que leur chez-soi. Le lieu est ouvert aux idées, par exemple il a servi dernièrement pour l’anniversaire d’un enfant du village, qui n’avait pas la place chez lui. Les clés sont là !
Dans les statuts, le café du tilleul peut héberger des projets en cohérence avec ses valeurs : écologie, justice sociale, prix adaptables : nous avons un petit rayon épicerie, produits bio si possible, sains, locaux du jardin… La ligue de l’enseignement (FAL), à laquelle le café est adhérent, a fourni les infos légales.
Et nous exposons dans le café pour décorer la salle, le décor change tous les trimestres, on a eu des affiches de mai 68, des photos d’hiver, une expo de Tanguy Crovisier, artiste corrézien… Nous avons ouvert des ateliers divers, langue : anglais le samedi matin, Pierre fait découvrir régulièrement la nature autour du village en tant que naturaliste et indigène du cru, il y a de la poterie avec Annick, de Gros-Chastang, une dizaine de personnes pratiquent. Également un atelier vocal, travail de la voix avec une prof de chant. Nous menons des projets ponctuels : des concerts, au moins une fois par an. L’été dernier cela s’est passé dans l’église, et à Pâques 2019 nous accueillerons Gilles Puyfagès ; Les 8 et 9 novembre, le pressoir mobile de Roule ta pomme sera à Saint-Martin et pour le 11 novembre, nous avons rendez-vous au pied d’un arbre gravé : c’est un grand-oncle de Pierre qui a laissé une trace contre la guerre sur un hêtre, au bord du chemin entre Bort et Argentat. Il apparaîtra bientôt dans un topo-guide rando du secteur.
D’autres projets sont… en projet : un marché de Noël en essayant de toucher les producteurs/artisans locaux ; un autre autour de la forêt et du bois, de l’agriculture… »

Angèle vient d’arriver au village, il y a un mois et demi : « Je voulais déménager et changer d’endroit , je tournais en rond à Tulle, j’avais déjà « travaillé » quelques jours au café cet été, je connaissais Frédérique et Pierre, par l’association Réseau Salariat, je connaissais donc le lieu et certaines personnes… J’ai l’habitude du public, j’ai travaillé – et continue ponctuellement d’y travailler – à Planète Nature à Tulle et j’y retrouve une bonne ambiance un peu similaire. Il y a du passage – pour le pain – et des rencontres de gens improbables ! J’y suis de permanence le jeudi matin. » « Mais tu vas voir dans quelques mois ! », fait remarquer Pierre – qui s’est endormi dans la salle cet hiver ! Un site internet a été ouvert par Julie : cafedutilleul.fr.

Je finis ma bière et une bonne assiette de charcuterie-fromage (et je paye le tout hein, pas de corruption de journaliste en herbe à La Trousse corrézienne), et je quitte Angèle à la nuit tombée. Un autre monde, en tous cas un lieu et des gens qui se bougent, cohérents et bien sympathiques.

Par Christophe Rastoll