« Avec moi il est infernal ! »
« Elle ne parle pas en classe ? Mais c’est une vraie pipelette à la maison ! ». « Il est calme avec toi ? Mais avec moi il est infernal ! ». Envie de hurler à l’injustice ou à votre incapacité ? Halte-là, pas si vite. Il se pourrait bien qu’en fait, c’est parce qu’avec vous il se sent bien.
Nos enfants, tout comme nous, ne sont pas les mêmes tout le temps, partout. Ils s’adaptent inconsciemment en fonction de leur environnement. Leur objectif premier, comme tout individu : la survie. Surtout quand leur milieu devient hostile.
Hostile, adj. : Qui semble contraire à l’homme et à ses entreprises.
Un milieu devient hostile pour un individu quand celui-ci ne se sent pas respecté dans ses besoins fondamentaux : respect de ce qu’il est profondément, de son rythme, de son degré de développement…etc. Pour un petit enfant dont le besoin d’attention sur lui est encore grand, se retrouver avec 29 autres enfants peut être pour lui terrifiant. Un autre qui a besoin de bouger pour apprendre (un « kinesthésique* ») devra se contrôler pour rester assis toute une journée.
Stress = fuite ou attaque
Cette hostilité ressentie déclenche une réaction de stress dans le corps, des mécanismes de défense se mettent en place : fuite (retrait, mutisme) ou attaque (violence, insolence). L’enfant comprend rapidement que la fuite est la solution qui lui fournira le plus de tranquillité. Le calme apparent ne doit donc pas être interprété autrement : il est dans une situation trop stressante pour lui, voire il se sent en danger. Non il n’est pas sage, il s’efface…
Quand il retrouve le nid
Et quand il quitte enfin l’hostilité pour retrouver la douce chaleur du nid, de votre attention, de votre amour, que se passe-t-il ? C’est l’heure de la décharge. Cris, crises, sauts, coups, tout y passe. Parce que l’énergie déborde et inonde. Et qu’il faut bien l’évacuer.
Notez que nous ne faisons pas mieux : que faisons-nous après une journée à contrôler notre envie d’arracher les yeux du client irrespectueux ou du collègue méprisant ? Au mieux, on jure dans notre voiture. Au pire, ce sera la fessée pour celui qui n’aura juste pas rangé ses chaussures…
Inévitable ? Non. On peut prévoir les digues et les trop-pleins. Pour tout le monde !
Evacuer, écouter, permettre
et encadrer l’expression
Certains enfants ont besoin de passer d’abord par le défoulement : un bon punching-ball ou un coussin de colère pour taper tout son saoul. D’autres préfèrent au contraire s’isoler pour s’apaiser : installez ensemble dans la maison un « coin plumes » où personne ne peut être dérangé. Agrémenté de plumes pour souffler dessus (la respiration profonde agira dans le processus d’apaisement), d’objets rassurants, oniriques, ludiques, il permet de passer plus facilement à autre chose.
Quant à l’expression, parfois rien ne sort. Peut-être ne trouvent-ils pas les mots. N’insistez pas. Parlez-leur de votre journée, de vos émotions et ressentis. Cela leur fournira non seulement du vocabulaire à réutiliser, mais ils se sentiront également autorisés à se dire. Et le moment venu où ils réussiront à se confier, surtout n’oubliez pas : nous avons besoin d’être écoutés, pas sermonnés ni conseillés : é-cou-tés !
* dont l’intelligence passe par le corps, on en parle au prochain numéro !