AU SILO À ARGENTAT épicerie vrac et sourire sans compter
Printemps 2017, place de l’église. Le vieux quartier déserté par ses commerces anciens, traversé par des initiatives éphémères. Deux locaux en location affichent une nouvelle : bientôt « le Silo, café librairie et épicerie vrac ». « Eh bé » ai-je pensé, ma tête de calculatrice de chiffre d’affaires en route, un truc en vrac ici ? Va jamais tenir ! six mois après l’ouverture, Valérie et Fabrice sont là, c’est chaleureux, ils connaissent tout le monde, et j’y suis très souvent !
Alors quoi qu’y se passe ici pour que ça marche ?
Des engagements
Valérie et Fabrice habitaient en Bretagne : lui travaillait comme aide-soignant en gériatrie, elle, avait quitté son emploi de bibliothécaire et un projet de café librairie, lieu d’échanges et de vie, lui titillait les neurones. Impossible à réaliser sur leur lieu de vie breton. Qu’à cela ne tienne, ils aiment bouger. Valérie connaissait la Corrèze : « tu verras, ça te plaira ». Et les voici arrivés ! Café librairie en tête auquel s’ajouterait une épicerie vrac qui correspond bien à leur choix « de faire autrement » et à leur engagement vers le zéro déchet. Ils découvrent le territoire, ciblent un triangle Tulle-égletons-Argentat, rayonnent.
Décembre 2016 est le temps de la double décision : un terrain idéal pour un futur habitat auto-construit à Monceaux-sur-Dordogne, et un double local, place de l’église à Argentat, dans le vieux quartier, à un loyer plus que raisonnable, un accueil très bienveillant des élus, alors ils y vont avec leurs valeurs comme cadre de décision.
Être Autonome et équitable
Aucun prêt, des coûts réfléchis à minima, condition de l’indépendance et de prix équitables, abordables « On veut que ce soit possible pour tous. » Deux piliers de décision qui conduisent à un aménagement à partir de matériel récupéré, du beau et du fait soi-même. La recherche des bons produits, localement chaque fois que c’est possible, au bon prix en évitant que le vrac ne soit un emballage reporté à l’échelle du vendeur.
Un café avec des coins livres !
Un coin livres neufs spécialisés sur ce qui est en cohérence avec le vrac (auto-construction, éducation, jardin, économie d’énergie, de l’eau, recyclage), un coin occasion pour les romans, des livres à lire sur place ou à emprunter, dont un fonds superbe de bandes dessinées, des jeux et à l’extérieur la boîte « circul’ivre » ! Les banquettes confortables installées sur des palettes incitent à rester, tout comme la terrasse délimitée par les jardinières légumières. On peut y boire un petit noir du Mexique, Saint-Domingue ou du Congo, du thé vert et noir, des jus de fruits variés, etc. On y trouve aussi la boîte pour « cafés suspendus » à offrir.Les infos locales sont affichées, c’est là qu’on les trouve le plus,
« certains passent juste pour être au courant » et si elles y sont c’est que tout le monde, y compris la Trousse, a vite trouvé sympa l’endroit pour les poser. « Je pourrais mettre une expo sur Rédénat ? » « Oui bien sûr, tu l’amènes et on regarde ». Tout d’un coup, on a l’impression qu’il y a plein de choses qui nous ressemblent qui existent.
Du vrac à la quantité qu’on veut
« Mais oui, cela fait 0.63 € de pois cassés, mais non ce n’est pas grave, vous pouvez n’en prendre que pour 0.63 € ! »
La voisine âgée qui vient acheter régulièrement cent grammes de fruits confits pour le cake du dimanche. Café, thé, tisanes, épices – ah l’odeur des épices ! – Pâtes, riz, farine, légumes secs, sucre, chocolat, muesli, graines, huile, produits ménagers, lessive, shampoing… Le bruit des contenants qu’on sort du panier, mais aussi des contenants prêtés pour les non habitués. Un dépôt pour des légumes du maraîcher et pour des œufs est organisé .
Et ça passe et ça brasse ! Comme disent Valérie et Fabrice, le plaisir c’est ce grand brassage de population qui se rencontre : les artisans qui refont le toit de la maison voisine, les habitants du quartier qui trouvent à parler, les convaincus, les gourmets pour les épices, et ça papote et ça papote.
Souriants, ils sont encore étonnés de l’accueil qu’ils ont eu. Et nous, ravis de l’accueil qu’on reçoit et des échanges de table à table. Pour le moment, ils me rassurent :
« pas de bénéfice, mais aucun problème de trésorerie et le chiffre augmente. » L’objectif c’est l’équivalent d’un SMIC pour deux. « Cela va continuer à se construire, pour la plupart des magasins, quand ils ouvrent tout est posé, nous c’est évolutif, cela bougera mais sans changer le chemin de cohérence interne. » Bref, de la bienveillance sereine dans ce monde de brutes, ça marche !